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Le tennis, une école de philosophie

Le troisième jeudi de novembre, chaque année, l’Unesco promeut la journée internationale de la philosophie. Alors oui, cela paraît osé d’associer la plume à la raquette, la sueur à la métaphysique, Djokovic à Nietzsche… Mais nous nous sommes laissés inspirer par un livre sorti il y a 18 ans, écrit par l’ancien professeur de philosophie et ancien joueur de tennis Christophe Lamoure, intitulé : « Petite philosophie du tennis ».

Voici donc les grands penseurs dont les préceptes se manifestent, selon Lamoure, dans le tennis :

Aristote. «Il enseigne à faire preuve de prudence dans l’existence, à rapporter nos actes à nos possibilités et à nos moyens. C’est un précepte essentiel pour un tennisman qui doit jouer avec ses moyens pour ne pas « surjouer » au risque de tout perdre. »

Platon. «Dans l’allégorie de la caverne, Platon nous apprend à ouvrir les yeux sur le réel. Quand on débute ce sport, on croit que voir est simple c’est alors que l’on frappe à côté de la balle ou qu’on la cadre mal. Le tennis éduque le regard, il apprend à voir vite et juste.»

Épicure. «La question du désir figure au centre de son enseignement. Pourquoi joue-t-on au tennis ? Pour éprouver un plaisir, indépendamment de la défaite ou de la victoire.»

Les Stoïciens. «Le stoïcisme est une philosophie qui vise à distinguer ce qui dépend de vous et ce qui n’en dépend pas et qui enseigne que notre volonté doit s’attacher aux choses sur lesquelles elle peut être efficace. En tennis aussi, il faut opérer un partage entre ce qui dépend du moi (mon jeu, ma concentration, ma tactique) et faire abstraction des éléments sur lesquels on n’a pas de prise (le temps, la qualité du court, l’arbitrage). »

Descartes. «Il parle de générosité. Pour lui, il s’agit de la capacité à se déterminer pour un but et s’efforcer de l’atteindre de toute son âme, sans réserve. L’engagement total est le propre des grands champions »

Nietzsche. «Comme il l’enseigne, il faut penser sans réflexion. Penser sans se regarder penser. Il faut une pensée en actes, qui se confonde avec le corps. Corps et pensée doivent être en harmonie parfaite. Quand un joueur commence à se regarder penser, qu’il introduit du doute, de la distance, qu’il commence à se demander ce qu’il fait sur le court, il risque de perdre ses moyens. »

Sommes-nous les seuls artisans de notre victoire ?

Quant à la victoire, Lamoure nous rappelle que, depuis la nuit des temps, c’est toujours le plus fort qui l’emporte. Comme dans les luttes primitives, les combats de gladiateurs ou les duels du Moyen Âge, la même chose se produit dans le sport de nos jours. Avec une petite différence : à la fin, il n’y a pas de morts.

« Cela veut dire que la force permet toujours d’identifier de manière indiscutable un vainqueur », continue Lamoure, « à la condition que ce vainqueur respecte les règles. Voilà pourquoi la force est acceptable dans le sport. C’est parce que le respect des règles la purifie de toute violence. »

Une victoire « jamais totale », précise l’ancien joueur, puisqu’elle ne repose pas sur une pure domination sur l’autre. En effet, elle se détermine au fur et à mesure des échanges à travers les réactions qui s’enchainent face aux gestes, aux erreurs, aux exploits de l’adversaire…

Autrement dit : sa propre victoire dépend aussi de l’autre. Un jeu individuel, donc, mais loin d’être solitaire.

La victoire se construit dans l’effort constant de fournir des réponses adaptées et gagnantes aux aléas du jeu. « Tout comme dans la vie », confirme Lamoure, « mais au tennis, c’est un peu plus clair parce qu’il y a une petite balle jaune qui indique ce lien entre les joueurs ».